Lorsque je vois cette petite silhouette s’étirer, sa petite frimousse qui se met à grimacer et sa voix feutrée et encore tout endormie, je ne peux pas m’empêcher d’être attendrie, encore plus que d’habitude. C’est comme ça. Elle a toujours été craquante. Elle n’est pas du matin, comme moi, ce qui fait que, souvent, elle n’est pas bien réveillée directement. Cependant, cela la rend encore plus mignonne. C’est évident. A l’entente de sa phrase emplie de sommeil, je ne peux pas m’empêcher de rire. Comme j’essaye, sans vraiment essayer à fond en fait, de me retenir de rire, il n’y a que quelques gloussements qui sortent de ma gorge. C’est pathétique. Mais, au plus je me dis que c’est pathétique, au plus je rigole. Je finis par me calmer, au bout d’une longue minute pendant laquelle je me suis demandé comment j’allais faire pour ne pas avoir un fou rire. C’est contagieux et en prime, cela allait lui faire mal aux côtes, alors si ma sœur s’était mise à me rejoindre…ça aurait été à la fin de tout ! On n’aurait plus pu nous ravoir. Heureusement, je me suis contenue à temps. Un large sourire, d’après ce que je sens, étire encore mes lèvres. Je lui réponds enfin, même si ces phrases n’ont pas énormément d’importance, tout en me retournant vers le plateau et en m’emparant du thermos afin de faire couler le somptueux liquide d’un brun profond dans le mug de Mi Youn :


« J’utilise cette métaphore justement parce que tu aimes dormir. Tu devrais te sentir honorée, ce genre d’animal est tellement mignon. » dis-je, presque en m’extasiant. Je me retrouve face à elle pour lui tendre sa grande tasse fumante et j’ouvre la bouche pour la prévenir-dans le but de la taquiner aussi-:

« Attention, c’est bouillant et je l’ai fortement remplie ! »

Je m’éloigne quelque peu afin de nous amener sa table ronde et je retourne me servir à mon tour de la boisson chaude que je me suis préparée. J’aime énormément le thé, mais le matin, je préfère boire un café, surtout quand la journée s’annonce bien remplie. Je me relève ensuite pour placer devant chacune quelques pâtisseries, et je m’assois sur le lit, en faisant bien sûr attention à ne pas l’écraser. A la vue, ô combien tentante, de ces pâtes dorées, de ces sucres décoratifs multicolores ainsi que de ces paillettes elles aussi colorées et de chocolat, je ne peux pas m’empêcher d’en avoir l’eau à la bouche. Et, aussi folle et enthousiaste qu’une petite fille derrière son premier gâteau d’anniversaire, ou presque, je m’empare d’une serviette ainsi que d’un petit cake aux fruits rouges confits, après avoir bu une gorgée, et je m’exclame d’une voix forte :


« Bon appétit ! » je mords donc avec appétit dans la couche dorée et moelleuse de la pâtisserie. Le goût si doux de ce gâteau, l’onctuosité de sa pâte, la saveur quelque peu acide et sucrée des fruits rouges-paradoxal-, …tout cela me donne des frissons qui me parcourt vraiment tout le corps. Je suis définitivement bien réveillée ! Adieu le cauchemar que j’ai fait ! Ou presque, ces images bouillonnantes sont récalcitrantes. Elles tournent dans ma tête comme un ballet de feuilles mortes. Sauf que ce dernier est nettement plus agréable à regarder, et je peux ne pas le faire par manque d’envie. Or, je n’ai jamais envie de revoir les images de cette scène effrayante, de mon père au-dessus d’une autre femme. J’ai énormément de chances d’avoir une petite sœur comme Mi Youn. Aussi, je remercie le Destin qui nous a conduites l’une vers l’autre. Pourtant, le fait que mon père aie trompé la mienne me reste sur l’estomac. Quoi que, je crois que cela n’a pas été le pire. Je pense surtout que ce genre de scène sexuelle est traumatisant pour un enfant, quel qu’il soit.