Cela devait faire près d’une heure que Mi Kyung était assise à une table pour étudier. Ou du moins, c’était l’intention pour laquelle elle était venue. Car en ce moment-même, elle n’était plus vraiment en train d’étudier; elle était plutôt en train de sommeiller sur son livre de science ouvert, ses feuilles éparpillées un peu partout sur la table, tenant de façon inactive son cahier de note en main. Les bras ramenés sur la table, elle avait le visage enfuis dans ceux-ci, les yeux fermés. Elle avait pris l’habitude de directement se rendre à la bibliothèque après les cours, plusieurs fois dans la semaine, histoire de réviser. Parfois, quelques-uns de ses amis venait la rejoindre, mais comme les horaires étaient pas mal tous différents d’un élève à l’autre, il s’avérait plutôt difficile de se retrouver quelque part. Même que ces derniers temps, elle s’était trouvé un copain d’étude en science. Il s’agissait d’un jeune homme dénommé Gabriel. Certes, il était peut-être dans un niveau d’étude inférieure à elle, mais les sciences restaient les sciences peu importe le niveau. Qui sait, peut-être allait-elle le croiser aujourd’hui ? D’ailleurs, elle pouvait presque sentir des regards posés sur elle et sans doute que plusieurs devaient se dire que si elle voulait dormir, elle n’avait qu’à aller dans son lit plutôt que de rester ici.

Dans tous les cas, elle ignorait combien de minutes venaient de s’écouler depuis le temps qu’elle avait commencé à dormir et son temps de réveil brusque. Réveil brusque ? En fait, la jeune fille venait tout juste de se faire réveiller par quelqu’un qui venait de s’accrocher dans ses pieds, sans doute par accident, alors que cette personne avait pris place à ses côtés. Par conséquent, elle sursauta de façon à se retrouver soudainement redressée sur sa chaise. C’est là que son regard croisa celui de la dite personne qui n’était nulle autre que Gabriel. Gabriel qui pour la première fois, venait de s’asseoir à côté d’elle plutôt qu’en face d’elle. Elle afficha d’abord sourire pour finalement faire une petite moue. « Mon dieu ! Je suis désolée. Ce n’est pas vraiment poli de dormir en face de quelqu’un. Enfin… à côté… » fit-elle tout bas avant de froncer les sourcils démontrant une certaine surprise. « Sérieux, depuis quand ?»

▬ there is no one like me.

Gabriel détestait ce genre de journées. Vous savez, celles où vous êtes tellement fatigués que même le cours qui vous passionne le plus arrive à vous endormir. Il ne se souvenait pas avoir un jour autant lutter contre le sommeil. Il faut dire que la veille, il s’était couché à 5h pour se réveiller à 7h. Deux petites heures pour dormir. Comment cela se faisait-il ? Eh bien il avait passé toute sa nuit sur un devoir qui lui avait donné énormément de fil à retordre, mais ce matin en le rendant, il était presque sur d’avoir une note qui frôlerait la perfection. Alors même si il était épuisé, il savait que c’était pour une bonne cause. Lorsqu’enfin la dernière sonnerie de la journée pour lui retentit, il se dépêcha de noter la dernière phrase que le professeur venait de prononcer et rangea ses affaires dans son gros sac en cuir noir.

Et comme presque chaque jour depuis un moment, il n’allait pas rentrer directement chez lui mais faire avant un petit détour par la bibliothèque. Pour étudier oui, mais surtout pour voir une certaine jeune femme, à savoir Mi Kyung. Depuis quelques temps, ils se retrouvaient régulièrement à la bibliothèque pour étudier ensemble. Dès qu’il posa le pied dans la salle, son regard se posa immédiatement sur la silhouette qu’il ne connaissait que trop bien. Instinctivement, il s’avança vers elle mais encore un peu dans les vapes, en voulant s’installer à ses côtés, il réussit à, dieu seul sait de quelle manière, s’accrocher dans ses pieds, manquant de tomber. Heureusement, ses fesses se posèrent pile poil sur la chaise. La voyant se redresser brusquement, Gabriel pouffa légèrement de rire, couvrant sa bouche avec sa main. Qu’elle était mignonne. Apparemment, il n’était pas le seul à manquer de sommeil. Il s’approcha un peu, tirant sa chaise vers elle, et d’une main, replaça quelques mèches des beaux cheveux tout en lui répondant : « J’ignore depuis combien de temps tu dors, mais tu as bien failli me tuer .. Une nouvelle fois. » Il faisait là allusion au jour de leur rencontre où elle lui avait balancé ses cahiers dessus sur le coup de l’énervement. Après un bref sourire, il s’installa convenablement sur sa chaise, et prit son sac pour en sortir ses affaires de cours. Il ouvrit immédiatement un cahier ainsi qu’un livre, et commença même à écrire. Oui, Gabriel était pas loin d’être une machine. « Tu as passé une bonne journée j’espère ? » Leur petite tradition lui plaisait beaucoup. En général, Gabriel avait du mal à s’entendre avec les filles, mais il y avait des exceptions comme Mi Kyung ou Sun Young. « Tu m’as l’air drôlement fatiguée en tout cas. »

Elle sentait encore son cœur débattre dans sa poitrine à cause de son sursaut. Bon sang ! Avait-elle dormi aussi profondément que ça ? Elle se passa une main dans le visage le laissant ensuite lui replacer quelques mèches. De loin, elle pouvait voir la bibliothécaire les regarder durement pour ensuite leur faire des « shhhhh » indiquant qu’ils faisaient trop de bruit. Ce qui par conséquent, força la demoiselle à rouler les yeux pour les reposer sur son ami. « J’ignore depuis combien de temps tu dors, mais tu as bien failli me tuer .. Une nouvelle fois. » Elle afficha une moue pour finalement froncer les sourcils légèrement. Leur première rencontre avait simplement été un accident. Lorsqu’elle avait balancé ses livres, il s’avérait que Gaby passait au mauvais endroit au mauvais moment et c’est lui qui les eu mangé sur la tête. Donc pour ce coup-là, elle assumait bien d’être la fautive. Mais là… « Alors tu vas m’expliquer comment quelqu’un qui dort, parfaitement inerte sur une table peut parvenir à presque tuer quelqu’un ? » fit-elle pour lui tirer la langue. Ses yeux suivirent le mouvement des mains du garçon pour le voir y sortir ses choses afin d’étudier à son tour. Automatiquement, Mi Kyung tassa un peu les siennes qui prenaient un peu toute la table pour lui laisser un peu de place. « Tu as passé une bonne journée j’espère ? Tu m’as l’air drôlement fatiguée en tout cas. » Elle regarda un instant ses notes laissant un certain délais entre la question du garçon et sa réponse. Un soupir… ce fut ce qui sorti de sa bouche en repensant à sa journée. Et son air… un air totalement blasé. « Je ne sais pas si le fait d’avoir passé toute la nuit à étudier pour un examen important et finalement se faire dire que celui-ci sera reporté à la semaine prochaine parce que le prof est absent, peut être qualifié comme étant une bonne journée. » Et le pire dans tout ça, c’est que la majorité des élèves étaient ravis parce qu’ils allaient avoir plus de temps pour se préparer. Mais pour Mi Kyung, c’était plutôt une situation frustrante. « Et toi ? »

En essayant de se remettre à écrire là où elle était rendue, elle tourna discrètement le regard vers Gaby. En fait, elle n’avait pas vraiment remarqué à quel point il était mignon en ce moment, dans ces vêtements. Un jeune homme classe, propre, charmant. « Dis-moi… combien de fille as-tu fait craqué dans cet ensemble aujourd’hui ? » lança-t-elle un peu timidement, le visage complètement penché sur ses feuilles, trop gênée pour le regarder à nouveau.

Gabriel ne savait pas trop comment ils en étaient venus à devenir des amis, parce que franchement, même si il la trouvait magnifique, en temps normal il aurait juste fait en sorte de tirer son coup et zou à la poubelle. Était-ce la science qui les avait autant rapproché ? Peut être bien oui. Leurs âmes de bosseurs sans doute aussi. Et qu’il le veuille ou non, Gabriel était tout doucement en train de s’attacher à ce petit bout de femme. Alors il sourit en la voyant tirer la langue, qu’elle était mignonne. « Peut être parce que même en dormant tu arrives à être une catastrophe vivante ? » Ce n’était en rien méchant bien sur, Gabriel ne faisait que se moquer gentiment d’elle. D’ailleurs, c’était rare qu’il ne pense pas réellement ce genre de paroles, alors Mi Kyung pouvait s’estimer chanceuse pour le coup, même si elle ne devait sans doute pas s’en rendre compte. Les gens comme elle ou Sun Young, avec qui il se comportait comme un ange, ne voyaient pas son mauvais côté. Tant mieux quelque part, mais c’était prendre le risque d’être déçu un jour.
Quelque fois, lorsqu’elle parlait, il avait l’impression de s’entendre. À sa petite anecdote, Gabriel ne put s’empêcher de rire très discrètement car il aurait eu exactement la même réaction et la même frustration. En signe de compassion, Gabriel appuya avec son index sur la joue de la demoiselle avant de replonger dans ses formules scientifiques. Il prit soin de bien terminer la question qu’il était en train de faire avant de lui répondre. « Je n’ai dormi que deux heures cette nuit, à cause d’un putain de devoir, mais je pense avoir une bonne note. » Gabriel n’avait jamais eu une seule mauvaise note de toute sa vie. D’ailleurs, ses bulletins étaient toujours parfaits. À tel point qu’on l’avait soupçonné de tricherie au lycée comme il avait eu les notes maximales aux examens. Ce côté parfait avait tendance à agacer.

Se replongeant dans ses leçons, il ne releva la tête que lorsqu’il entendit une nouvelle fois la douce voix de son amie. Ah oui ? Elle pensait vraiment ce qu’elle venait de dire ? Faisait-elle partie de ces filles ayant craqué pour lui ? Gabriel en était presque sur. Quelque part, il en jouait énormément. Voyant qu’elle n’osait pas le regarder, il s’approcha d’elle, et posa sa joue contre ses feuilles de cours, son visage se retrouvant ainsi infiniment proche du sien. C‘était la première fois qu‘ils se retrouvaient aussi proches en fait. « C’est un compliment ? » Demanda-t-il alors qu’en temps normal il se serait contenté de dire que oui, il en avait fait craqué un bon paquet. « Merci. » Il lui sourit doucement, avant de rapprocher encore son visage, mimant l’approche d’un baiser puis se recula brusquement et se remit à travailler. Sans la regarder, il lui renvoya le compliment « Et toi ? Combien de tête fais-tu tourner avec ce joli minois ? » 

Ce qui arrivait souvent avec Mi Kyung, c’est qu’une fois qu’elle avait établie un certain attachement et un certain niveau de confiance avec quelqu’un, il était rare de savoir si cela faisait longtemps ou non qu’elle connaissait cette personne. En fait, on avait souvent l’impression qu’elle connaissait tous ses amis depuis des années, même si cela faisait à peine quelques mois. Et en ce moment, c’était un peu comme ça avec Gabriel. « Peut être parce que même en dormant tu arrives à être une catastrophe vivante ? » Elle lâcha un petit grognement après avoir gonflé les joues. Comment il ne s’assumait pas celui-là ! Mais bon, heureusement qu’elle savait que tout ça n’était que taquinerie. Dans tous les cas, il y eut à nouveau un instant de silence alors qu’ils s’étaient remit à leur travaux. Voir même qu’elle eut seulement le temps de lire la mise en contexte que le jeune garçon vint la perturber en appuya son doigt sur sa joue, répondant finalement à sa question. « Je n’ai dormi que deux heures cette nuit, à cause d’un putain de devoir, mais je pense avoir une bonne note. » Elle remonta la tête avant de grimacer. Au moins, elle était contente d’entendre qu’elle n’était pas la seule dans sa situation de manque de sommeil même si contrairement à lui, même en mettant des nuits entières à étudier, elle parvenait à avoir des notes parfois médiocres.

Si Mi Kyung était d’abord venue ici pour étudier et s’avancer dans ses travaux, elle devait avouer qu’elle avait un peu de mal à le faire. Non pas qu’elle ne comprenait rien à rien de la matière, mais disons qu’avec le garçon à ses côtés, c’était… plutôt déconcentrant. Oh non, elle ne comptait pas lui demander de partir, au contraire. Elle appréciait grandement sa présence. Seulement là… il venait de trouver le moyen de totalement la faire rougir. Du coup, la jeune fille baissa davantage son visage qu’elle accota sur l’une de ses mains, secouant un peu sa tête afin que ses longs cheveux viennent la cacher. C’est là qu’elle aperçue le visage du garçon collé sur les feuilles sur la table, essayant sans doute de voir l’air de la demoiselle. Son regard resta cependant fixé sur ses feuilles avant de le dévier vers le sien, un sourire timide s’élargissant dans son visage. « C’est un compliment ?... Merci. » Elle rougit de plus bel, ne disant rien, essayant de se retrouver dans son étude. Pourtant, elle sentait bien que le garçon la fixait toujours et c’est sans plus attendre qu’elle pris son cahier de note et le mit doucement par-dessus son visage encore sur la table pour lâcher d’un air amusé et calme « Jang Gabriel, tu n’es pas correct ! Tu me déconcentres… ». Le geste qu’il fit ensuite lui fit malheureusement perde toute concentration restante, alors qu’elle le regardait les yeux légèrement plissé, essayant de comprendre pourquoi il essayait tant de la faire réagir de la sorte. « Et toi ? Combien de tête fais-tu tourner avec ce joli minois ? » Court moment de silence. « Depuis un moment, que la tienne faut croire. »

C’était vrai qu’il faisait tout pour la déconcentrer. Même avant, lorsqu’il s’installait en face d’elle plutôt qu’à côté, il la fixait durant de longues minutes, et il savait qu’elle les sentait ses regards, mais qu’elle faisait tout pour ne pas les croiser. Car ils étaient insistants, brulants même. Gabriel ne savait pas ce qui lui plaisait tant chez la demoiselle. Elle était jolie, mais Sun Young aussi était jolie, un tas d’autres filles dans cette université étaient au moins aussi jolies, si ce n’est plus quelques fois. Pourtant, depuis qu’elle avait failli l’assommer à coups de cahiers et qu’ils avaient établi un contact, quelque chose d’étrange se passait entre eux. Comme une sorte d’alchimie, de contact. Un lien était en train de se créer avec que Gabriel faisait en général tout pour éviter que ce genre de choses ne se produise.

À la réponse à sa fausse question, Gabriel leva un sourcil, tournant soudainement son visage d’ange vers elle. Ah, comme ça elle pensait faire tourner sa tête à lui ? Comment pouvait-elle en être si sure ? Visiblement, elle était la plus perturbée des deux, peut être la seule d’ailleurs. Gabriel s’amusait beaucoup de sa gêne et du fait qu’il devait sans doute lui plaire. « Qu’est-ce qui te fait penser ça ? » Demanda-t-il d’un ton calme, de sa voix si douce et pareille à un murmure. Même lorsqu’il n’était pas dans des lieux comme la bibliothèque qui réclamaient le silence, il ne parlait pas très fort. Beaucoup de gens lui demandaient de répéter. Non pas qu’il manque de confiance en lui, c’était juste sa façon de s’exprimer. Achevant d’un point final la réponse à la deuxième question de son devoir, il laissa tomber sa tête sur l’épaule de Mi Kyung. « J’ai vraiment pas envie de travailler. » Il soupira bruyamment, gonflant ses joues. Quelques fois, il pouvait se comporter d’une façon terriblement mignonne, quand bien même c’était loin d’être volontaire. Il leva les yeux vers le visage de Mi Kyung, s’amusant une nouvelle fois de sa gêne avant de remonter ses lèvres à hauteur de son oreille. « Et je suis sure que toi non plus. » Souffla-t-il avant de reprendre ses distances. Il posa son coude sur la table, sa tête dans la paume de sa main, et recommença à la fixer comme il le faisait si souvent. « Tu as beaucoup de travail encore ? »

« Qu’est-ce qui te fait penser ça ? » Elle arrêta d’écrire, tournant la tête dans sa direction. Tandis qu’elle haussa les sourcils, elle tenta de chercher une réponse laissant malgré tout un certain temps d’hésitation. « Euh… bah… je… » fut néanmoins tout ce qui sorti de sa bouche à ce moment-là, sur le même ton qu’il avait employé. Puis… « T’façon t’arrête pas de me regarder alors bon… » ajouta-t-elle finalement sur un air qui se voulait faussement hautain et boudeur, pour finalement reposer ses yeux dans ses affaires. Franchement, à la voir agir de la sorte on croirait presqu’elle avait un œil sur le garçon. Bon, certes elle le trouvait mignon, mais si elle était aussi déstabilisée c’était simplement parce qu’il agissait comme tel et qu’elle a toujours aimé se faire désirer. Par la suite, elle eut à peine le temps de recommencer à écrire qu’elle sentie la tête du garçon venir se déposer sur son épaule, celui-ci se plaignant alors. Elle amena donc sa main sur sa joue et la lui caressa de façon plus ou moins sérieuse, comme pour chercher à le « consoler » « J’ai vraiment pas envie de travailler. Et je suis sure que toi non plus. » Elle ne dit rien lors de quelques secondes, essayant de terminer la phrase qu’elle voulait écrire depuis déjà cinq minutes. En fait, si au début la motivation avait été présente, là, la demoiselle la cherchait bien. En même temps, Mi Kyung commençait à ne plus trop comprendre l’instant présent; pourquoi depuis tout à l’heure Gabriel n’arrêtait-il pas de lui murmurer à l’oreille et de lui dire les mots exacts pour la faire rougir ? Il le faisait exprès, ça elle le savait. Mais là, c’était à se demander s’il n’avait pas une idée en tête. Sa phrase terminée, elle laissa tomber son crayon sur ses feuilles avant de lâcher un soupir et de se caler dans sa chaise. « Non, en effet… » Son regard se posa dans le vide pendant quelques secondes avant d’entendre à nouveau la voix du garçon. « Tu as beaucoup de travail encore ? » La jeune élève regarda ses feuilles et ses livres en affichant une grimace. « Si, mais avec toi à mes côtés c’est carrément impossible. Mais ne t’en fais pas, ce n’est pas grave si je les termine plus tard. Mh, pourquoi ? » Ce « Pourquoi » avait été dit avec une certaine crainte qui se lisait sur son visage. En fait, elle était convaincue qu’il voulait lui demander de faire autre chose, mais si elle se fiait à tous ces petits regards lancés, à ces murmures qui ont été soufflés à son oreille et au fait que Gabriel était un homme…

Le plus dure était encore de faire semblant, de ne pas éclater de rire. Parce qu’il fallait le reconnaître, plusieurs fois lorsqu’il la mettait dans l’embarras, il en avait envie. Comment résister en même temps ? Il jouait au garçon attiré (même si il fallait avouer qu’il l’était au moins un peu, bon d’accord, beaucoup même) et elle, elle rougissait, bafouillait et tout ce qui peut s’accorder avec la gêne. N’était-ce pas drôle comme situation ? Et comme si ses regards ne suffisaient pas Gabriel en rajouta une couche en posant sa tête sur l’épaule de la demoiselle. Il ne s’attendait néanmoins pas à ce que la jeune fille agisse. Elle ne semblait pas trop gênée pour le coup, et même, elle posa sa main sur sa joue, provoquant quelques frissons à Gabriel qui n’avait pas eu de relations physiques - vous voyez ce que je veux dire - depuis un moment maintenant. Ses études lui prenaient tout son temps, il ne trouvait plus le moyen de s’amuser ou de se détendre. À vrai dire il n’avait presque plus de vie privée. Il finit par se décoller de Mi Kyung, reprenant son ancienne position.

Et à la réponse à sa dernière question, il ne put que sourire. Alors comme cela, il la perturbait au point qu’elle avait du mal à se concentrer ? Pauvre jeune fille. Habituellement, Gabriel s’installait en face d’elle, ils faisaient sagement leurs devoirs tout en papotant et s’échangeant quelques regards, mais là, aujourd’hui, allez savoir pourquoi, il s’était assis avec elle et se faisait plus joueur qu’avant. Dans le fond, ça l’avait lassé, et il avait en quelque sorte envie d’être encore plus proche de Mi Kyung. Mais la crainte qu’il aperçut dans ses dernières paroles l’intrigua plus que ne l‘amusa. Il se redressa alors, fronçant légèrement les sourcils. « Je ne sais pas, comme ça. » Alors il haussa les épaules, n’ayant à aucun moment eu des intentions étranges. Avec le dos de son stylo, il appuya sur la joue de Mi Kyung. « Tu devrais travailler, sinon tu auras beaucoup de travail ce week-end et tu ne pourras pas te détendre. » Dit celui qui n’avait pas pris de bon temps depuis un long moment maintenant. Il se remit dans ses cours, écrivant encore et encore. Oui, Gabriel était capable de passer du coq à l’âne en un temps record. Sensuelle et tactile puis la seconde d’après plus froid et limite distant. « Tu fais quelque chose ce week-end d'ailleurs ? » Demanda-t-il comme ça, mais aussi parce qu’il était curieux. Puis un jour, il aimerait beaucoup la voir en dehors de cette bibliothèque. En boîte peut être, allez savoir ce que cela pourrait donner. Bah oui, c’était un homme, et en cela il pensait notamment au plaisir charnel. M’enfin, il était trop attaché à elle pour la prendre et la jeter. Mine de rien, faire des devoirs, ça tisse des liens.

« Je ne sais pas, comme ça. » Un long soupir de soulagement s’échappa de ses lèvres. Elle préférait de loin entendre cette réponse que celle qu’elle croyait qui était le cas. N’empêche, en voyant Gabriel la regarder de façon intriguée elle se sentit dans l’obligation de lui avouer ce qu’elle croyait qu’il allait lui répondre. Et mine de rien, c’était plutôt… embarrassant, encore une fois. « Ouf, alors là j’ai eu peur. Je croyais que tu allais me demander autre chose… » Elle s’arrêta. Elle ne voulait pas s’imaginer le fou rire qu’allait sûrement se prendre le garçon en lui avouant ça. Ou alors il allait au contraire la trouver vraiment obésédée ce qui allait davantage l’embarrasser. Elle baissa donc son regard, se grattant la tête en jouant avec ses cheveux, comme elle le faisait toujours lorsque quelque chose la mettait mal à l’aise. « Je croyais que tu allais me demander de… enfin que tu avais des intentions pas nettes en tête comme… comme celui de s’isoler et de faire des trucs avec moi. » Mi Kyung releva son regard sur lui mais ne le laissa toutefois pas parler. Elle préféra plutôt s’embarquer dans ses justifications pour qu’il comprenne pourquoi elle lui disait ça. « Depuis tout à l’heure tu es là à me murmurer à l’oreille et à me regarder de façon gênante, je sais pas mais ça m’a fait flippé parce que tu es un mec et que je suis une fille et qu’on trouve l’autre joli et que la façon dont tu m’as demandé ça laissait à désirer, bon ! » Elle appuya ses coudes sur la table se tournant légèrement de côté afin d’éviter de le regarder cette fois. Son ton s’était fait un peu grognon, mais c’était seulement contre elle et non contre le garçon.

Heureusement, la conversation pris rapidement un autre chemin et la demoiselle retrouva sa position initiale le corps tourné vers lui. « Tu devrais travailler, sinon tu auras beaucoup de travail ce week-end et tu ne pourras pas te détendre. Tu fais quelque chose ce week-end d'ailleurs ? » Ses sourcils se arquèrent avant que ses joues ne se gonflent. « J’apprécie que tu t’inquiètes pour moi mais je suis capable de gérer mes choses tu sais. » fit-elle avant d’afficher un sourire pour finalement lui tirer la langue. « Et puis c’est de ta faute aussi, si t’étais pas venu me rejoindre j’aurais déjà avancé, gnah ! » Sur ce, elle referma tous ses cahiers et fit une pile avec ces feuilles pour mettre le tout l’un par-dessus l’autre. « Cela dit, si tu veux sortir avec moi ce week end, je suis partante. J’attendrais ton beau cheval blanc à ma porte et tu m’amènes où tu veux. » lâcha-t-elle en affichant un large sourire tel une gamine le ferait.

Gabriel ouvrit grand les yeux. Mais qu’est-ce que signifiait ce gros soupir ? Visiblement, il venait de lui ôter un lourd poids en prononçant ces quelques mots. Il se redressa tout en écoutant les explications de la jeune femme. Lui demander autre chose ? Comme lui demander quoi ? Gabriel ne voyait pas tellement où elle voulait en venir, et pourtant, il était une véritable flèche d’habitude. L’invitant du regard à continuer afin d’éclaircir les choses, il commença à froncer les sourcils petit à petit suite aux paroles de Mi Kyung. Attendez, elle avait pensé qu’il voulait .. ? Pour une fois que ça n’avait pas été son intention -même si il ne dirait pas non bien sur-. Il camoufla sa bouche avec sa main, afin de dissimuler son rire et surtout de ne pas faire trop de bruit. Ils étaient tout de même dans la bibliothèque de l’université, et n’avait aucunement l’envie de se faire remarquer plus qu’il ne l’avait déjà fait juste avant en manquant de tomber. « Je peux trouver une fille belle sans vouloir baiser avec elle. » Des mots crus. Juste pour que Mi Kyung soit encore plus gênée, juste pour être vulgaire et lui lancer une légère pique qui sous-entendait que peut être il ne pourrait pas la désirer. Ce qui était totalement faux. Comme elle s’était tournée, il se rapprocha, et posant sa main sur sa joue, la força à réorienter son regard vers lui. Là il colla son front au sien. « Mais toi, tu en as peut être envie ? » Il avait pris soin d’articuler chaque syllabe de manière à ce que sa langue soit parfaitement visible. Provoquant ? Juste un peu, et juste quand c’est drôle. La seconde suivante, il reprit immédiatement ses distances avec elle, éclatant de rire et faisant de son mieux pour ne pas faire trop de bruit.

Il se calma assez rapidement, ne voulant pas non plus faire fuir Mi Kyung et dévia la conversation sur un tout autre sujet. Elle était mignonne, elle avait beaucoup de mimiques, Gabriel s’en rendait compte lorsque comme là, elle gonflait adorablement ses joues. Ce qui le fit sourire doucement d’ailleurs. Mais à sa remarque suivante, il prit une fausse mine de choquer, pinçant la joue de son amie. « Hé ho, on ne dit pas ça, c’est pas très gentil hein. Sinon je viens plus travailler avec toi tout court. » Comme si il le pouvait, il était habitué à présent. Ça lui plaisait d’avoir de la compagnie, lui qui est pourtant si solitaire. Il se demandait vraiment comment elle était en dehors de cette bibliothèque. Au début pourtant, leur relation s’arrêtait à leurs devoirs, mais à force de parler, d’apprendre à la connaître. Il avait envie de voir la vraie Mi Kyung. Chose plutôt étrange, lui qui prend normalement tant de soin à instaurer de la distance. « Où je veux ? Vraiment ? » Il se rapprocha d’elle, jusqu’à ce que leurs visages soient proches et que le bout de leurs nez se touchent. « Tu prends des risques là tu sais. » Oh oui, elle ne savait vraiment pas ce dont il était capable. « Dans ce cas, je te cherches demain à dix-neuf heures tapante. »

Elle soupira. Bien qu’elle aimait tout de même la situation dans laquelle elle était, elle la trouvait aussi choquante. Choquante parce qu’elle ne connaissait pas Gabriel assez bien pour savoir si la façon dont il agissait avec elle, était aussi la façon dont il agissait avec les autres ou alors si c’était spécifique à elle. Hors, elle ne savait pas exactement quoi penser. Si elle pensait blanc, elle réalisait que c’était noir et si elle pensait noir, il lui montrait plutôt blanc. Et c’est exactement l’effet qu’eu ses paroles sur elle. « Je peux trouver une fille belle sans vouloir baiser avec elle. » Le ton cru qu’il employa, bien qu’il était soi disant faux, lui fit réaliser qu’elle se faisait probablement trop d’idée. Et elle était tellement dans ses pensées qu’elle ne remarqua même pas qu’il était amusé. « Euh oui… oui tout à fait. Je… Pardon. » lâcha-t-elle doucement de façon sérieuse et exprimant une certaine confusion. Ou du moins, cette confusion se lisait dans son visage, alors qu’elle avait tourné son corps de profil à lui. Toutefois, le garçon la força à se retourner en sa direction alors qu’il vint mettre sa main sur sa joue, son regard se plantant dans le sien pour finalement se baisser lorsqu’il vint coller son front au sien. « Mais toi, tu en as peut être envie ? » Elle avait remonté son regard lorsqu’il prit parole pour tout de suite le rebaisser. Elle ignorait pourquoi elle se sentait nerveuse tout à coup. Mais laisser un silence à cette question n’était pas non plus la meilleure réponse à donner. « Je peux avoir des pensées à propos de toi sans qu’elle ne soient vraies envers moi. » fit-elle sur à peu près le même ton qu’il avait employé précédemment. Mi Kyung ou comment se rattraper. Elle n’était tout de même pas pour lui dire qu’il lui faisait un certain effet.

Lorsqu’ils reprirent leur distance, le sujet était tout autre et celle-ci fit une grimace lorsqu’il vint lui pincer la joue d’un air qu’elle savait faussement vexé. « Hé ho, on ne dit pas ça, c’est pas très gentil hein. Sinon je viens plus travailler avec toi tout court. » Elle arqua un sourcil lui démontrant qu’elle ne le croyait pas du tout à ce point. La jeune fille fronça alors son nez pour ensuite se tordre la bouche en guise de fausse réflexion. « Arrête ! Je sais bien que tu ne peux pas te passer de moi. » Un large sourire apparu. C’était de même pour elle avec lui-même s’il s’amusait à la faire flipper et à la déstabiliser au plus haut point. Au fond, elle aimait bien. « Où je veux ? Vraiment ? Tu prends des risques là tu sais. » Dans le temps qu’il dise ça, ils se retrouvèrent à nouveau très près l’un de l’autre et le frôlement de son nez contre le sien lui arracha quelques petits frissons. « Je crois que tu vaux la peine que j’en prenne. Je te fais confiance. » Il spécifia donc qu’il sera là pour 19h. Elle afficha un sourire. « N’empêche, je suis curieuse. Tu vas m’emmener où ? »

Gabriel se renfrogna lorsque la demoiselle lui dit qu’il ne pouvait pas se passer d’elle. Il n’aimait pas qu’on dise ce genre de choses, si ça n’avait pas été Mi Kyung, il ne se serait d’ailleurs pas gêné pour la remettre à sa place. Mais il ne voulait pas la blesser, et surtout, ils étaient en public, alors pas moyen de faire une scène. Il ne voulait avoir besoin de personne, et encore moins d’une fille qu’il connaissait à peine. Ce n’était pas son genre du tout. Alors il passa outre ce qu’il venait d’entendre, continuant son petit jeu de séduction avec Mi Kyung. Comment pouvait-elle croire qu’il valait le coup ? La pauvre, si elle savait. Oh, il l’apprécie, mais il ne fait tout de même que jouer. Et si par malheur une mini étincelle s’enflamme dans son cœur, vous pouvez être sur qu’il ira l’éteindre aussitôt. Pas question de s’attacher, c’est une incitation à la douleur et Gabriel ne veut pas souffrir. Faire souffrir les autres à la limite, mais pas lui. « Tu ne me connais pas assez pour dire cela. » Encore un coup de froid. À chaque fois qu’elle était à la limite d’apercevoir le réel Gabriel, il la refroidissait. Rétablissant une sorte de distance qu’il brisait dans un même temps physiquement parlant. « C’est un secret. » Chuchota-t-il en affichant un séduisant sourire en coin. Après quoi, il déposa un baiser au coin de ses lèvres, revenant à sa place.

Il rassembla toutes ses affaires, les remit dans son sac et dégaina son Iphone. Il se leva, et juste avant de s’en aller, ajouta : « Fais-toi belle. Si tu ne l’es pas, je te laisse moisir chez toi. » Et si elle se demandait si il en était capable, la réponse était oui, Gabriel en était parfaitement capable. Il ébouriffa les cheveux de Mi Kyung, et après un dernier clin d’œil s’éclipsa tout en composant un numéro. La porte de la bibliothèque se refermant au moment où il salua la personne de l’autre côté du fil.