Depuis combien de temps suis-je là, assis dans cette voiture? Je ne sais pas. Je ne sais pas où je suis. La ville que je connais si bien défile devant mes yeux, mais je ne la vois pas. Je suis dans mon monde, dans un rêve. Non. Pas un rêve. Un horrible cauchemar dont je n'arrive pas à m'échapper. Ueda est là, assis à côté de moi. C'était lui, au téléphone. Il est venu me chercher, tout à l'heure. Ce matin, ou peut-être cet après-midi. Ça non plus, je ne sais pas. Depuis qu'il m'as appeler, les larmes n'ont pas arrêter de couler sur mes joues. C'est à croire que je me vide de l'eau qui constitue de mon corps. Je me suis trompé tout à l'heure; mon coeur n'as pas exploser, il n'est pas mort. Il agonise, il souffre, il saigne toujours. Moi aussi j'ai mal, mais je ne veux pas me plaindre. Je ne souffre pas autant que toi Kazu, ta douleur est sûrement pire que la mienne. Je sais que tu as mal, mais ne meurs pas. J'ai tellement besoin de toi. Toi aussi n'est-ce pas? Ne t'inquiète pas, je serais bientôt près de toi.

La voiture s'arrête, je regarde par la fenêtre. Nous sommes toujours sur la route, entourés de voitures. Je recommence à paniquer: nous devons aller au plus vite à l'hôpital. Je dois voir Kazu, il a besoin de moi. Je me tourne vers Ueda, il serre les dents, et ses doigts sur le volant. Ses sourcils sont froncés.

- Pourquoi on s'arrête? Je ne le quitte pas des yeux.
- Il y a un accident, on est dans un bouchon.
-On ne peut pas attendre! O-on d-doit a-aller à l'hôpital! Ma voix se brise, j'ai de la misère à respirer.
- Jin je ne peux pas faire grand chose! On doit attendre.
- Combien de temps?!
- Je ne sais pas. Je dirais environ quarante minutes, peut-être plus.
- C'est trop long.
- Jin.
- C'est trop long.

Je sors de la voiture alors que Ueda me crie de rester à l'intérieur. Je ne peux pas attendre. Il a besoin de moi. Je dois le voir. Je crois qu'en fait, j'ai beaucoup plus besoin de lui que le contraire. Je me met à courir, je contourne toute les voitures. Quelques uns me klaxonnent, je cours plus vite. Je connait la ville, je suis de retour chez moi. Je ne pense qu'à une seule chose: le voir. L'hôpital est à environ 12 kilomètres.

Un point me tiraille le flanc droit, ma respiration erratique me fait tourner la tête. Je ne m'arrête pas, je cours encore plus vite. Je serais bientôt là Kazuya. Attend encore un peu. Je traverse les rues sans regarder si le feu est vert, je me fous complètement de prendre des risques. Je me fous des chauffeurs qui arrêtent de justesse et qui sortent de la voiture en gueulant. Je ne m'arrête jamais, tout ce que je veux, c'est atteindre l'hôpital.

Soudain, je me prend le pied dans quelque chose. Je m'écrase au sol, mon poignet droit amorce le choc au lieu de ma tête. Je reste par terre un peu, quelques secondes seulement. Mon poignet me fait mal, ainsi que mes genoux et ma cheville. Je gémit de douleur, de colère. Je dois aller à l'hôpital. Je me relève, légèrement étourdit. Dès que je pose ma cheville sur le sol, une douleur vive me parcours la jambe, tel un choc électrique. J'ignore la douleur, je recommence à courir. Nous serons bientôt tout les deux, je vois l'hôpital au loin. Je veux le voir, c'est tout ce qui m'importe. Ma cheville est affreusement douloureuse, mais je m'en fou. Elle serait brisée que je continuerais de courir, pour te voir, Kame.