Sonne, sonne, tu vas sonner oui? Je veux que cette fichue sonnerie se fasse entendre. Peut-être ne sonnera-t-elle jamais en fait ? Ce cours d’anglais me semble interminable. Je maîtrise cette langue, comme quelques autres, mais là, c’est le tronc commun dans ma filière, je ne peux pas sécher… Être boursier c’est cool, la preuve je suis en Corée, mais être surdoué, c’est chiant parfois… Ça me met de mauvaise humeur parce que les autres ne vont pas assez vite, ça m’énerve de perdre du temps, ça m’enrage d’y être obligé. Libération, le professeur nous lâche avant. Je m’empresse de ranger toutes mes affaires, soient une feuille et un stylo. Je ne sors mon laptop que pour les cours scientifiques, et encore. J’enregistre rapidement ce que l’on me dit, rares sont les fois où j’ai besoin de me relire. Je m’ennuie. Tout simplement. Alors j’essaie de profiter de la vie, à ma façon. Je sors de cette salle, pour aller vers une que je sais vide, sans regarder devant moi, je n’aime pas voir les gens qui m’entourent, je n’aime pas les gens qui m’entourent. Pourtant, ils sont attirés par ma personne, et j’ignore toujours pourquoi. Je pense que je ne le comprendrai jamais de toute manière, je fascine comme dit mon père, alors, tant mieux. Je fouille dans mon sac, à la recherche de mon iPod. Sans m’arrêter de marcher. Je sais que les gens qui seront devant s’écarteront en me voyant. Où est cet appareil ? Merde. J’avais oublié que tous ne s’écartent pas, que LUI ne s’écarte pas. Il fait tout ce qui m’insupporte, tout. Lee Tan est un sac à chier, enfin, il a tout pour me mettre encore plus en colère que je ne le suis déjà. J’ai de la force, mais face à lui je suis frêle. Je tombe, heureusement je retiens mon sac contre moi et mes affaires y demeurent. En grognant, je me relève.
- Un jour, quand ton corps primitif aura suffisamment évolué, tu iras t’acheter un cerveau et des yeux, ou pas ?
Je ne parle pas fort, je n’aime pas crier, mais mon ton est toujours si glacial, qu’il pourrait refroidir le soleil, ou une autre étoile semblable.

Tomber, entendre ses mains claquer au sol avec la seule satisfaction d’avoir fait tomber ses lunettes par la même occasion, c’est frustrant. J’en suis certain, il n’était pas plus vigilant que moi quant à où il mettait ses pieds. Pourquoi faut-il toujours que par A ou par Z je finisse par le voir ? Le destin ou Dieu ne comprend-il pas que je m’en passerais bien ? On ne comprend donc pas que plus loin il est de moi et mieux je me tiens ? Il n’est qu’une vermine rouge qui se plie à faire ce qu’on lui demande de faire, ça ne sert à rien. D’ailleurs, je me demande quoi écrire sur lui, ça pourrait être drôle…

Le couloir se vide, c’est vrai. Ici on ne se mêle pas de ce qui ne nous regarde pas, surtout si dans l’histoire les clans s’opposent. Les paroles de Tan me blessent, il ne s’en rend pas compte je crois. Je me fiche qu’on m’insulte, ou même qu’on me frappe puisque mes revers sont imparables, mais ce genre de mot, ce « pédale » qu’il vient de prononcer me fait extrêmement mal. Ce ne sont que des lettres alignées pour faire des mots, mais c’est une parole qui a une lame à double tranchant pour moi.

Je me retrouve plaqué au mur, absorbé par mes pensées je ne l’ai même pas vu faire. Dur à croire, mais il n’est pas si grand que ça pour moi, c’est juste qu’il impose quoi. Je ne réponds rien, je ne dis rien, je refuse de répondre à des attaques aussi basses, même si s’insulter est devenu notre pain quotidien. D’un geste rapide et précise je me dégage de son bras, j’arrête de regarder ses yeux de braise. Mon visage exprime mon dédain pour lui, malgré moi, malgré lui, à cause d’un simple mot qu’il vient de dire. Sac à la main, je reprends mon chemin, la salle est juste là, à deux ou trois mètres dans ce même couloir. « Pédale » ce mot résonne dans mon esprit, c’est trop bas, c’est bien trop bas, non ?

Fous-moi la paix. J’aimerais tellement lui gueuler ça. Tellement. Mais je ne peux pas, je sais pertinemment que ça ne sert à rien, je le sais même très bien, mais il y a aussi le fait qu’inconsciemment, mon corps, mes sens, je ne sais pas trop, quelque chose me dit de ne pas le laisser partir non plus. Cela doit faire partie des choses que nous ne comprendrons jamais. Un peu comme pourquoi est-ce que j’accepte que les hommes entrent en contact avec moi, et pas les femmes. Un peu comme pourquoi est-ce que je ne parle que peu, je ne souris que peu et pourtant je vis bien avec moi-même. Ça craint, ça craint d’être aussi différent, mais j’aime ça. En même temps, je ne pense pas avoir le choix, puisque je ne veux pas changer… Je trace ma route, mais je l’entends me rattraper. Tu ne veux pas me foutre la paix, sérieux ?

Déjà que tout est fait pour qu’on se rencontre, ne suit pas le chemin que le destin te trace en plus, ne l’aide pas quoi… On me tire, il me tire par le poignet. Il me ferait presque mal si je n’avais pas été habitué à de plus fortes douleurs. Nous voilà dans un couloir encore plus à l’abri des regards que les autres. Les salles de ce couloir-ci sont vides, abandonnées presque. Il me pousse. Je ne me débats pas, je n’en ai pas envie, pourtant dieu sait que moi aussi j’ai de la force. Je ne serre même pas les poings, je n’élève pas la voix, je plante juste mon regard dans le sien. A contre jour, il faut l’avouer, Tan se voit encore plus imposant qu’il ne l’est déjà…

- Je ne suis pas une pédale.

Je sens mes yeux aussi froids que mes mots. Mots détachés, lents, d’un ton bas, presque un murmure et pourtant si faciles à entendre. J’enrage, mais moi je ne sais pas chauffer, je gèle, et gèle tout ce qui m’entoure. Tendue, l’ambiance est extrêmement tendue. Je m’appuie contre un mur, je ne détache pas mon regard du sien. Alors, tu vas juste rester là ? Fous-moi la paix.

Parfois, j'aimerais juste, juste qu'il n'y ai que moi dans les couloirs, que moi dans l'établissement, que moi sur terre en fait, juste pour pouvoir vivre, l'espace de quelques secondes au moins, les choses à ma manière. Parfois, je crois y être, et bien sûr, à ce moment, Tan apparaît. A croire qu'on a été fait pour ça, pour s'emmerder sans fin. Bien entendu, son attention, toute son attention se concentre sur moi. Je produis toujours cet effet, sur qui que ce soit. C’est jouissif, vraiment. Je le vois, passer une main dans ses cheveux, je le vois, se demander e qu’il devrait faire, s’il doit se retenir ou pas. J’aime lire les gens, je ne les comprends pas pour autant, mais j’aime faire ça. S’approcher, coller sa main contre le mur, près de ma joue. Croyait-il réellement que j’allais bouger ? Ou à peine ciller ? J’espère pas, dans quel cas je pourrais affirmer qu’il me connaît mal, très mal même. Mes pupilles n’ont pas quitté les siennes. C’est étrange, mais je pourrais le regarder ainsi pendant des heures, je pense que je ne m’en lasserais pas. Cet air de défi, de supériorité qui ne fait que m’effleurer contrairement à tant d’autres qui s’y plient.

Les Troublemakers m’intéressent d’un côté, mais, ce serait trop d’efforts à fournir, ce serait être réellement sous les ordres de quelqu’un, ou du moins faire ce que l’on nous demande de faire, être au service en quelques sortes d’autrui, et même si c’est pour blesser, ce n’est pas la méthode que je préfère. Ma voix, va retrouver son phrasé habituel, lent, grave, et surtout, coupant les phrases à tord et à travers. Ma voix envoûte parait-il autant que mon regard. J’ignore si c’est vrai, mais je m’en sers, c’est certain. Pourquoi mordilles-tu ta lèvre ? Ce n’est pas bon signe, ce n’est pas l’attente d’une réponse qui te fait ça. Je le vois, j’ai vu comment tu m’as détaillé, je ne laisse jamais passer ce genre de détail.

- Tu ne… me donnes… pas de bons… arguments pour… le faire…

Un sourire malsain se dessine sur mon visage. Je n’ai toujours pas lâché ses yeux. De toute façon, je ne veux pas les lâcher.

Dites, pourquoi dès qu'il y a de la tension, dès que je me retrouve dans une situation où la tension n'est qu'à chaque seconde que plus palpable, ça en revient à pratiquement les mêmes réactions? Non pas que ça le déplaise, puisqu'il aime voir jusque quel point chacun peut être original, mais ça ne l'aide pas à comprendre les autres autour de lui. Seraient-ils tous égaux donc? J'écoute ce qu'il a à dire. Un meilleur statut? J'aime celui dont je bénéficie, personne ne me prend la tête, mais je prends la tête aux gens. Une simple fouine? C'est une façon de voir les choses, moi je prends mon rôle chez les Peekers comme un passe temps, comme une façon d'en savoir plus sur les autres, sans qu'ils sen sachent à mon propos. Sous l'emprise de Hyo Sun? Je ne saurais pas dire. Il n'a pas vraiment d'emprise sur moi, si? Ou du moins, pas ce genre d'emprise là.
Par contre, la dernière phrase m'intéresse bien plus, beaucoup plus. J'allais parler, mais sa bouche vient à mon cou. Il joue avec ma peau, mes poings se referment, je me retiens de les poser sur lui, je les garde bas, près de ma taille, le laissant faire. Une main sur mon torse, je demeure contre le mur. C'est loin d'être déplaisant, très loin même...

Il recule, comme comprenant qu'il vient de faire une erreur. Je ris, je ris d'un rire qui n'annonce rien de bon. Il ne sait pas se contrôler. Au moins, nous nous ressemblons sur un point.
- C'est bête... Tu n'assumes pas tes... propres arguments... Pourtant... Je le rejoins, attrapant son bras fermement, le tirant à moi, posant ma bouche au niveau de son oreille. Tu étais... si bien parti...

Jouons mon ami, jouons.

Quand je m'y attarde, quand je m'arrête trente secondes à réfléchir, si réfléchir on peut dans ce genre de situation, Tan est quand même le genre de type que j'aimerais bien... Non pas que je ne pense qu'à ça, c'est d'ailleurs rare que je ne pense qu'à ça, mais... Mais tout de même. Pouvoir y goûter ne serait pas de refus. Ma pensée est totalement en hors sujet, mais c'est normal, il est rare que je me focalise sérieusement sur ce qui se déroule. Je l'écoute, d'une voix grave il déballe ce qu'il a à dire, ses pseudos-arguments. Et là, je reviens à la réalité, j'enregistre doucement ce qu'il dit et ma nature reprend le dessus. Me vouloir? Oui mais non. Enfin, tout dépend de ce qu'il entend par là. Je ne suis pas un simple coup d'un soir. Non, ça il est hors de question. Mon expression n'a pas changé. Ce que j'aime, c'est que l'on ne peut pas me lire sur mon visage. Ses doigts sur mes lèvres, je souris toujours. Puisqu'il faut jouer... Je pose mes mains sur ses épaules, j'enlace son cou, je m'approche de sa bouche, mais je ne la touche pas, je le regarde droit dans les yeux, je souris toujours.
- Pourquoi... moi?

C'est vrai, pourquoi s'entêter à ça? Je ris un peu. Je colle mes lèvres aux siennes, je mordille sa lèvre inférieure, je joue. Je me décolle, gardant la même distance qu'avant ce baiser si soudain. J'aime faire ce genre de choses. Ce n'est pas prévisible, en même temps que ça l'est. J'ose toujours faire ce que bon me semble, je fais toujours ce que bon me semble, alors pour m'avoir à ses côtés, il en faudra plus, bien plus. Je le regarde à nouveau.
- Et puis... explicite ton... "plus"...

Il a aimé ça. Ça se voit, ça se sent, c'est palpable à comment soudainement son pouls a pris un rythme fou. Il est resté sur sa faim. Bin quoi? C'est normal non? Ce n'est pas à moi de lui donner ce qu'il veut, c'est moi qu'il faut convaincre! Je m'éloigne à nouveau de lui, je ne le lâche pas du regard. Cette tension qui nous entoure à chaque fois va au delà du simple mépris que nous aurions pu avoir l'un envers l'autre, "Aurions pu" oui, puisque tous deux savons que notre haine est fictive. Sa voix rompt le silence, il en est troublé et cela s'entend à son phrasé. Une satisfaction personnelle? Cela est tout de même intéressant... Peut-être qu'en fin de compte être chez les Troublemaker ne serait pas si mal. Il suffit qu'on me foute la paix, rien de plus, le problème étant, que j'aurai les Peekers sur le dos; je deviendrais leur seul sujet de rédaction, et ça, il en est hors de question. Rester où je suis, me convient tout autant.

Sa phrase ne s'achève, afin de venir se plaquer à moi, reprenant ma bouche. Ça me plaît. J'aime ce qu'il fait, j'aime qu'il perde le contrôle. Sa main sur mon cou, les miennes se tenant à sa taille, son baiser est des plus gourmands... Il parle à nouveau, le temps de reprendre son souffle, et reprendre son baiser là où il s'était arrêté. Je le lui rends avec plaisir, fermant mes poings autour du tissu qui couvre son ventre, le tirant d'avantage vers moi. Tu ne partiras pas Tan, hors de question.
- Laisse-moi... un temps de... réflexion...

Mes lèvres quittent les siennes un instant, pour venir s'écraser sur son cou, le mordant, le léchant. Ce cou si chaud, sa respiration devenant irrégulière, et nous, dans ce couloir désert.

C’est mal, c’est horriblement mal ce que je fais. S’allier avec l’ennemi est une trahison. Mais je ne me lie pas à l’ennemi, je profite de lui. Je mentirais, si on me demandait si j’ai envie de rejoindre les Troublemakers, je répondrais non à coup sûr, sans trembler. Mais… Je ne me mentirais pas, je ne sais pas me mentir. Je ne me connais que trop bien pour savoir que, si jamais je me lasse de ce que je fais avec Hyo Sun et… En fait c’est un choix très dur. L’offre de Tan est très alléchante, autant appeler un chat, un chat, mais je n’abandonnerais pas Soo Ah comme ça, en mode « J’ai un plan cul ailleurs, ciao ! » j’ai beaucoup trop à perdre en faisant cela. Alors pour l’instant, je le fais patienter, mariner dans la sauce comme qui dirait, et j’en profite du mieux que je le peux, parce que profiter est un plaisir sain, du moins je crois.

Je lui fais plaisir. Je le rends fou, tous mes gestes, toute action qui s’émane de mon esprit, quoi que je fasse en cet instant précis est fait pour qu’il ne s’échappe pas. Il est ma proie, et j’ai faim, extrêmement faim. Je ne suis pas du genre à enchaîner les coups, mais là… On parle de Tan tout de même… Un frisson me parcourt de part en part quand il caresse mon dos, mes reins ; il m’oblige à le fixer. Ses yeux sont noirs d’envie, et je suppose que les miens ne doivent pas être plus clairs. Je le tiens toujours, j’omets sa première question, je ne lâche pas son regard. Il m’envoûte. Il m’hypnotise, et mes mains n’ont toujours pas lâché son t-shirt. Ses doigts redessinent approximativement le tatouage que j’ai dans le dos, et ma peau se hérisse au passage. Un énième baiser, plaqué contre le mur, mes bras venant s’accrocher à son cou, je ne peux m’empêcher de soupirer un léger «Oui. » Une morsure dans le cou, je le mords encore une fois pour lui prouver ma faim. Puis d’un rapide coup d’œil je m’aperçois que personne n’est là pour nous voir. Alors j’attrape sa main, furtif, et nous enferme dans cette salle de classe vide dans laquelle j’ai l’habitude d’aller. Je viens ici si souvent, que j’ai le double des clés. Je m’appuie un instant contre la porte que je viens de fermer, me mordant la lèvre, le regardant inlassablement. Avoir quelques professeurs dans sa poche, ce n’est pas si mal en fin de compte, si ?

Celui qui savait que tout ça finirait ainsi peut brûler en enfer. Je pensais passer la soirée tranquille, je pensais pouvoir m'enfermer quelque part, mettre au propre mes notes pour le Peek Into, m'envoyer en l'air peut-être... Finalement, je risque de m'envoyer en l'air avec Tan. Je reprends ma phrase trois fois dans mon esprit. Vais-je faire ce que je viens de dire ce que je vais faire? Je crois bien. Je ne suis plus en état de m'interposer face à ça. Même si ma tête me criait non à un moment donné, mon corps le ferait taire, j'ignore par quel moyen, mais il le ferait. En fait, c'est la façon dont Lee réagit qui me rend fou. Je ne suis pas expert dans ce que je fais, loin de là, et voir que je ne m'y prends pas si mal... "Être bon... élève a du... très bon parfois..." Personne n'est venu faire le ménage. Merde, cette odeur me dégoute presque. Mais, il ouvre la fenêtre. Tant mieux, le lieu commence à s'aérer. Me poser contre la porte me permet de me remettre un peu de mes émotions. Émotions qui maintiennent mes sens comme jamais la drogue ne les a tenus éveillés. Je souris narquoisement à sa question. Je voudrais répondre "Partout" mais je préfère me taire.

Je sens le sang sur ma langue. Je me suis mordu la lèvre trop fort en regardant ce t-shirt s'envoler. Je ne sais pas pourquoi j'obéis, mais j'approche de lui. Et tout aussi rapidement, je me retrouve collé au bureau, allongé, et torse nu. Sa peau contre la mienne m'emplit de frissons. De faibles gémissements traversent mes lèvres tant il s'attaque à ma gorge, à mon torse brûlant. Je m'agrippe à son cou, en demandant encore. Je ne veux pas que sa bouche, je veux bien plus. Mes mains parcourent son dos musclé, provoquent des frissons au niveau de ses reins. Mes mains sont froides, et se faufilent sous son pantalon, venant se poser sur ses fesses, alors qu'une nouvelle fois je gémis en sentant ses dents se planter à mon cou.