J'étais à nouveau dans la nature, on m'avait défait de mes chaînes, on les avait laissés au magasin. Elles ne me manquaient pas. Cette nouvelle chambre que j'occupais, elle me terrifiait un peu. L'impression que tout était nouveau me donnait la nausée, mais je m'y ferai, je m'adapterai comme chaque fois que le sol menace de me faire flancher. Qu'il est capricieux, de toujours vouloir créer ces failles autour de moi. N'a-t-il point compris que je finissais toujours par me nourrir de ces mauvaises expériences et que s'acharner sur moi n'était qu'une perte de temps ? Mes doigts effleuraient le tissu pâle comme la neige, il me semblait si froid, si glacial. Alors que les draps devaient m'envelopper pour me donner un peu de chaleur. Comme un bambin encore dans le ventre de sa mère, j'apprécierais que ces draps me renvoient cette chaleur. Mais ils ne me le renverront pas. Je le sais. La fraîcheur des lieux me suivait partout. Ici également. Le chauffage dans les chambres était presque futile, seul l'air ambiant était brûlant. Je suffoquais parfois, quand la température me brûlait la gorge. C'était à en tomber malade, les chambres étaient plutôt bien chauffées pour certaines, tandis que le froid des couloirs était tels les tréfonds d'une grotte. J'en étais aujourd'hui à me demander pourquoi je n'avais pas encore subis de choque thermique tant les deux températures étaient différentes. Je n'étais pas tombée malade une seule fois, et c'était comme si j'attendais ce moment. À l'évidence, je voulais me préparer mentalement.

Deux semaines que j'ai attendu dans ce magasin, deux jours, qu'un nouveau vampire m’avait emmené en ces nouveaux lieux. La chambre était un tant soit peu différente de la précédente. Les décors étaient inexistants, la chambre était vierge de couleurs, il n'y avait ni vase décoratif, ni meubles ornés d'objets inutiles. Les pièces n'étaient constituées que le strict nécessaire. Je trouvais tout cela bien triste. Si l’on me voyait ainsi, les gens diraient que je m’ennuie, mais malgré la tristesse de la pièce, j’appréciais chaque teinture. Même les fissures presque invisibles au plafond, je l’ai apprécié. Pourtant il me manquait quelque chose, je n’étais pas sortie en pleine nuit une seule fois alors que je n’attendais qu’à le revoir. J’avais peut être peur de tomber sur un visage peu appréciable, il y avait tant de danger à cette heure si tardive. Je ne savais quelle heure il était, peut être une heure du matin.

Je me sentais épuisée d’avoir dormis toute la journée, je n’avais pas pris un bain de soleil depuis des lustres, me semblait-il. Était-ce ce que ressentait les vampires ? Le manque de ne pas pouvoir sentir les rayons brûlant du soleil glisser sur sa peau ? Je ne manquais pas d’empathie, mais souvent, je ne parvenais à ressentir les sentiments de certaines de ces âmes déchus. Je fermais les yeux, me plongeant dans ce profond précipice. Seulement quelques secondes de silence alors que je me trouvais perturbée par des voix dans le couloir. J’entendis quelqu’un crier. Je ne voulais pas sortir pour voir ce qui se passait, j’avais envi de faire le vide. Or, je n’y parvenais pas. Il me manquait se fragment d’humanité, il me manquait. Il me semblait que cela faisait des lustres que je n’avais pas vu son visage, le temps passait si vite pour moi ici.

À l’aide de mes coudes, je me redressais. Je ne pouvais pas me résoudre à rester éternellement cloitrée ici. Il fallait que je sorte, quitte à tomber sur quelqu’un de dangereux. Ne croyez pas que j’aimais le danger, malgré ma curiosité trop poussée, comment ne pas avoir peur de ceux qui vivait de la douleur des autres. Je m’entendis soupirer alors qu’enfin je me levais, je ne savais pas où j’irais mais j’avais besoin de respirer. Je tirais sur la porte, passant ma tête dans le couloir sombre. Il semblait n’y avoir personne, le silence était pesant. C’était comme si la poignée de porte était devenue glissante dans ma main. Elle m’échappa, et un bruit sourd parcourut le couloir, il y eut comme un écho. Je ne sursautais pas, je restais silencieuse et aux aguets. J’étais prête à rentrer à nouveau dans ma chambre si je voyais l’un de ces visages déformés par la folie. Si seulement Heikki avait été là, je me sentirais plus en sécurité.

Si je devais parler de mon nouveau maître, je ne saurais quoi dire. Il avait l’air d’être quelqu’un de confiance, j’appréciais qu’il ne m’ait pas mordu encore mais je ne savais absolument rien de lui. Sachant que je risquais de rester ici jusqu’à la fin de mes jours, j’aurais sans doute le temps de mieux le connaître. Mais pour le moment, ma seule véritable hantise était de retrouvée ce vampire mystérieux dont j’appréciais la compagnie.

Je restais silencieuse, toujours une main sur la poignet, une autre sur le mur de la chambre. J’observais et j’attendais. Je finissais par me lancer, après que je sois à la moitié du couloir, je ne me sentais pas la force de retourner en arrière si je le devais. Je ne voyais personne, et ce n’était que plus inquiétant. Mon cœur battait à tout rompre, c’était comme s’il souhaitait que je reste enfermé encore quelques minutes dans ce halo protecteur. Je me retrouvais quelques minutes plus tard devant la porte d’une autre chambre, et d’un mouvement lent, je toquais à celle-ci. Seul le silence me répondit. Patiemment, j’attendis encore quelques minutes, toquant à nouveau. Ces bruits pourraient interpeller d’autres personnes. Mais tout restait calme. En fin de compte, après vingt minutes d’attente, je dû me résoudre qu’Heikki était de sortie. Je fis la moue puis reprit mon chemin dans le couloir, rasant les murs. Je croisais un vampire, son visage ne se tourna même pas dans ma direction alors que je descendais d’un pas rapide les escaliers. En un clin d’œil, je fus dehors. Sans doute, direz-vous, que je suis stupide. C’était le meilleur endroit pour que je fasse une mauvaise rencontre. Mais saviez-vous que les couloirs des chambres étaient tout aussi dangereux ? Partout le danger régnait, alors si j’allais m’empêchée de sortir alors que peu importe où je serais, je pourrais être en danger… autant profiter de mieux qu’on pouvait de ces quelques moments de plénitude. J’inspirais profondément, il ne pleuvait pas, et c’était mieux. Ici, il pleuvait si souvent… Le temps était idéal pour ces âmes en peine…

Je ne sais pas comment je me suis retrouvée près de la fontaine, mais je crois apprécier cette endroit. Peu de personnes viennent ici, même le soir. Les années passées, je n’avais rencontré personne ici.

L’herbe était fraiche, mais son odeur était rassurante. Je m’allongeais, fermant les paupières. Quelque chose de dangereux devait se préparer. J’entendais seulement le bruit du vent et des feuillages, le bruit de la fontaine, rien d’autre. Pas même des pas dans les buissons, pas même un sifflement, un cri. Comme si je m’étais tout à coup transporter dans une autre dimension, que j’avais quitté ces terres imprégner de sang. Ce moment passager de béatitude ne dura qu’un instant, un bruit m’obligea à ouvrir les yeux. Mais je restais allongée, confiante, suicidaire ? Je tournais lentement la tête en direction de l’ombre qui venait d’apparaître entre les arbres. Je restais silencieuse, j’attendais quoi réellement ? Je ne le savais pas. Mes réactions étaient parfois énigmatiques. Je sentais le danger me frôler la peau, mais je me disais, si c’est maintenant que je dois mourir, c’est que quelqu’un l’a décidé. Je ne nagerais pas à contre courant pour perdre à cause de l’épuisement. Je ne me débattrais pas. Je poserais des questions à l'agresseur, je lui demanderais peut être pourquoi moi ? Seulement parce que j'étais là au mauvais moment. Soit mais...

Brusquement, je me redressais, la tête me tourna tellement je m'étais relevée vite. Mais la surprise était plus forte, un sourire étirait mes lippes alors que d’un pas presque chancelant je m’approchais de l’ombre encore peu visible. Mais je l’avais reconnu.

« Heikki… »